Racine bucolique à Port-Royal
Louis XIV et les jésuites font chasser les religieux de Port-Royal des Champs, repaire des jansénistes, en 1709 et, en 1712 l'abbaye fut « rasée par la poudre ».
Au 17e siècle, il attire pourtant ceux qu’on appelle « les solitaires » ou encore « ces messieurs de Port-Royal » qui viennent y chercher la paix et le repos de l’âme, notamment Racine à partir d’octobre 1655. C’est là que, dans un cadre propice à la rêverie poétique, il écrit ses premiers vers, par exemple Odes sur le paysage de Port-Royal.
Racine se promène volontiers le long d’un chemin qui va de l’abbaye jusqu’au village de Chevreuse, aujourd’hui baptisé « Chemin de Jean Racine », qui lui inspire ce poème :
Que je me plais sur ces montagnes,
Qui, s’élevant jusques aux cieux,
D’un diadème gracieux
Couronnent ces belles campagnes !
O Dieu, que d’objets ravissants
S’y viennent offrir à mes sens !
De leurs riches vallées
Quel amas brillant et confus
De beautés rassemblées
Éblouit mes yeux éperdus !...
*
Je vois ce cloître vénérable,
Ces beaux lieux du ciel bien-aimés,
Qui de cent temples animés
Cachent la richesse adorable.
C’est dans ce chaste paradis
Que règne en un trône de lis
La virginité sante :
C’est là que mille anges mortels
D’une éternelle plainte
Gémissent aux pieds des autels...
*
Je vois les altières futaies,
De qui les arbres verdoyants
Dessous leurs grands bras ondoyants,
Cachent les buissons et les haies.
L’on dirait même que les cieux
Posent sur ces audacieux
Leur pesante machine,
Et qu’eux, d’un orgueil non pareil,
Prêtent leur forte échine
A ces grands trônes du soleil...
(Racine, Le Paysage en gros)
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Date de dernière mise à jour : 25/02/2020